L'Eglise en croisade contre l'éducation sexuelle

Publié le 15 Janvier 2013

I. L'Eglise en croisade contre l'éducation sexuelle


 

 

L'introduction d'un module sur la sexualité dans les programmes scolaires a provoqué une charge sans précédent de l'influente Eglise catholique contre le gouvernement social-démocrate de Zagreb. L'éditorial de Novi List.

 

"La sexualité est un énorme pouvoir, celui qui la contrôle, contrôle la société". C'est en ces termes qu'Ana Maria Grünfelder, la théologienne féministe a expliqué la "guerre" entre l'Eglise catholique et le gouvernement qui secoue actuellement la Croatie au sujet de l'éducation sexuelle à l'école.


Ces derniers jours, on a pu entendre tout et n'importe quoi à ce sujet. Un théologien de renom, Adalbert Rebic, a littéralement déclaré : "La Croatie est en train à rejoindre le complot mondial des pédés, des homosexuels et des gouines qui s'efforcent d'imposer les opinions d'une minorité à tous les autres en menaçant ainsi la société de sombrer dans la déchéance." Le cardinal Josip Bozanic a estimé que les cours d'éducation sexuelle, introduits dans l'enseignement scolaire par le ministre de l'Education Zoran Jovanovic, "menaient à l'anéantissement de l'homme". Le comble a été atteint lorsque l'adjoint à l'évêque de Zagreb, Valentin Pozaic, a comparé le pouvoir actuel à celui des nazis et des communistes.


"La révolution culturelle et anthropologique néocommuniste et néolibérale ne prend pas en considération l'homme tel qu'il est, mais elle le transforme en machine de satisfaction des besoins sexuels, qui ne connaît ni l'amour, ni la chasteté, ni la fidélité, ni le sacrifice ni la solidarité", a dit Pozaic. Mais il ne s'est pas arrêté là, en ajoutant avec un clin d'œil nationaliste : "On oublie que Dieu a créé Adam et Eve, et non pas Adam et Stevo", ce dernier étant un prénom typiquement serbe. Puis, l'ecclésiastique s'est interrogé à haute voix : "Le ministre Jovanovic a-t-il un vagin ?" en référence au contenu du module d'enseignement qu'il a introduit à l'école qui porte justement sur les différences sexuelles et les personnes transgenres.


Il s'agit d'un enseignement de deux heures sur toute l'année, mais cela a visiblement suffi à provoquer l'ire de l'Eglise. Vu la teneur des invectives, cette offensive aurait pu être comique si elle ne révélait pas une tentative de décrédibiliser, voire de destituer, un gouvernement [social-démocrate] légitimement élu. Pozaic n'a-t-il pas dit que "la Croatie avait besoin d'une nouvelle Oluja pour la foi ["Tempête" : opération militaire de reconquête de la Krajina, région occupée par les Serbes, menée à l'été 1995]" ? Le ministre de l'Education a probablement raison quand il dit que l'Eglise joue désormais le rôle de la droite conservatrice et nationaliste de l’Union démocratique croate [HDZ, le plus grand parti nationaliste croate] qui, après près de vingt années au pouvoir, est actuellement dans l'opposition. Mais quand des évêques appellent à la guerre, l'affaire prend une tournure encore plus grave.

 


Par  Tihana Tomičić

 

Source : courrierinternational.com, le 15 janvier 2013.

Article paru à l'origine sur novilist.hr, le 12 janvier 2013.

 

 

 

 

II. L'Eglise catholique en croisade contre l'éducation sexuelle

 

 

ZAGREB - L'introduction de l'éducation sexuelle dans les écoles en Croatie divise cette ex-république yougoslave et provoque le mécontentement de parents et de la puissante Église catholique, partie en croisade contre le gouvernement de centre-gauche.

 

Le gouvernement met en place cette année un programme expérimental de deux ans, avec l'objectif affiché de sensibiliser les élèves aux problèmes potentiels liés à la sexualité. Les thèmes vont de la contraception à la masturbation, en passant par les maladies sexuellement transmissibles, l'homosexualité ou l'égalité des sexes.

 

Près de 2.000 grossesses d'adolescentes et 400 avortements sont recensés chaque année en Croatie, a indiqué à l'AFP le responsable gouvernemental chargé de préparer ce programme, Vinko Filipovic.

 

"Au vu de ces données alarmantes, il est nécessaire de faire l'éducation des enfants qui arrivent à l'âge de la maturité sexuelle", fait-il valoir.

 

Le programme cible les élèves de neuf à dix-huit ans, qui recevront 3 ou 4 cours d'éducation sexuelle par an. Le programme n'étant pas basé sur des manuels particuliers, les élèves discuteront des thèmes avec des experts ou des professeurs.

 

Mais ce programme a suscité l'inquiétude du clergé catholique, soutenu par l'opposition et des associations conservatrices de parents, qui estiment que l’éducation sexuelle est de la responsabilité des parents et craignent un endoctrinement.

 

"La paix de notre patrie est en jeu!", s'est exclamé récemment l'archevêque de Zagreb, Josip Bozanic, en dénonçant un programme "destructeur et dangereux".

 

L’Église a distribué à travers le pays des dépliants invitant les parents à signer des pétitions contre le programme.

"Cela ne vous gêne-t-il pas que vos enfants apprennent qu'une relation homosexuelle est aussi naturelle qu'une relation entre un homme et une femme?", lit-on sur un dépliant distribué dans les magasins.

 

Une association conservatrice de parents, Grozd, dénonce une initiative imposant "une vision de la vie qui va à l'encontre des valeurs de la plupart des parents", dans ce pays où quelque 86% des 4,2 millions d'habitants sont catholiques.

 

L'association n'est pas contre l'éducation sexuelle à l'école, mais aurait voulu que les parents aient leur mot à dire sur le contenu et puissent choisir entre deux programmes selon leurs valeurs.

Selon elle, les thèmes abordés ne sont pas adaptés à l'âge des enfants.

 

"Ce programme viole le droit des parents de décider de l'éducation qu'ils veulent donner à leurs enfants. Cela viole un droit de l'homme fondamental, celui de penser différemment", a expliqué à l'AFP Ladislav Ilcic, chef de Grozd.

 

Un débat public fervent sur cette question s'est intensifié ces dernières semaines, un autre évêque de Zagreb, Valentin Pozaic, allant jusqu'à appeler à renverser le gouvernement, le comparant aux régimes totalitaires communiste ou nazi.

 

Les Croates semblent divisés sur la question: selon un sondage récent, 56% des Croates pensent que l'éducation sexuelle est nécessaire et que l’Église ne devrait pas s'y mêler, mais 33% que ce programme n'est pas acceptable pour les catholiques.

 

Certains, comme Goran Miletic, un commerçant d'une trentaine d'années, père de deux enfants, soutiennent le gouvernement: "L'éducation des enfants devrait tenir compte de la réalité pour les préparer à tout ce qui les attend dans la vie".

 

D'autres y sont défavorables. Ivo Horvat envisage d'interdire à son enfant de 15 ans d'assister à ces cours, ce que les autorités ne sont pas prêtes à tolérer. Ce qu'il craint, c'est que ce programme ne fasse "de la propagande homosexuelle déguisée en tolérance".

 

Les quelque 516.000 élèves concernés sont eux aussi divisés sur ce sujet.

"C'est beaucoup de bruit pour rien. On verra à quoi ça ressemble, mais l'Église ne devrait pas s'ingérer dans les écoles", estime Laura, 15 ans.

 

Goran, un adolescent, préfère quant à lui "poser des questions à vos amis plus âgés, alors que les instituteurs pourraient se sentir mal à l'aise de discuter de certains thèmes avec les élèves".

 

Le ministre de l’Éducation, Zeljko Jovanovic, a dénoncé un comportement "inacceptable, malveillant et diffamatoire" de l’Église.

"Ils peuvent dire tout ce qu'ils veulent en dehors des écoles, mais ils ne peuvent pas décider de ce qui y sera enseigné", a-t-il martelé.

 

Opprimée dans la Yougoslavie communiste, l’Église catholique s'est imposée comme un partenaire des autorités de Zagreb après la proclamation de son indépendance en 1991 et intervient dans le débat public.

 

Pour Ivica Mastruko, sociologue des religions et ancien ambassadeur croate auprès du Vatican, "c'est une nouvelle tentative de l'Eglise catholique de s'imposer comme une force politique dans la société".

 

Cette nouvelle controverse fait suite au bras de fer qui avait opposé le gouvernement de centre-gauche à l'Eglise au sujet de la Procréation médicalement assistée. Le gouvernement a modifié la loi en 2012 pour autoriser la congélation des embryons et donner aux femmes célibataires accès à la PMA.



Source : nouvelobs.com, le 10 mars 2013.

 

 

 

 

III. Interdite d'antenne pour avoir critiqué l'”éducation sexuelle”

 

 

Cette info nous arrive via l'observatoire de l'intolérance à l'égard des chrétiens, fondé par l'Autrichienne Gudrun Kugler : une présentatrice de télévision croate, Karolina Vidović-Krišto a été suspendue de ses fonctions pour avoir dirigé et présenté une émission critiquant le programme d'« éducation sexuelle » mis en place par le gouvernement de gauche de son pays.

 

L'émission « Slika Hrvatske », destinée aux Croates de l'étranger et très suivie par ceux-ci, a été diffusée le 29 décembre dernier, à un moment où le sujet fait l'objet de larges débats. Karolina Vidović-Krišto y a donné la parole à ceux qui mettent en avant les points négatifs du projet gouvernemental.

 

Dès le lendemain, la télévision publique HRT/HTV a présenté des excuses publiques en assurant que les opinions exprimées au cours de l'émission n'étaient pas les siennes : « En raison de violations graves des règles professionnelles et d'un abus de sa position, HRT prendra des mesures fortes » à l'égard de la présentatrice.

 

De fait l'émission de Karolina Vidović-Krišto a été suspendue et elle n'exerce plus ses fonctions de rédacteur en chef auprès de HRT/HTV.

 

Une association croate, « Incubateur d'innovation civique », a écrit à Reporters sans Frontières pour se plaindre de cette sanction idéologique, en soulignant que « le programme était bien documents, produit de manière professionnelle et d'un intérêt significatif pour les citoyens de Croatie ». La même lettre évoque un sondage en ligne demandant aux participants qu'ils avaient été « choqués » par la manière dont l'émission avait présenté l'« éducation sexuelle » qui s'imposera aux écoles croates. 84 % des sondés ont choisi la réponse : « Finalement, ce qui a été dit était vrai. »

 

La visée évidemment antichrétienne des sanctions qui frappent une journaliste pour avoir fait son métier se comprend à partir du contexte de l'émission. Celle-ci est intervenue au moment où une forte tension s'est révélée entre l'Eglise catholique au gouvernement croate à propos de ces trois heures annuelles d'« éducation sexuelle obligatoire » (ça ne vous rappelle rien ?) dont l'objectif sera d'enseigner la sexualité, l'égalité de genre et les « bons comportements » dans ces domaines. L'Eglise, par la voix de l'évêque auxiliaire de Zagreb, Mgr Valentin Pozaić, a invité les catholiques à s'élever contre le projet, rappelant (selon le site http://balcanicaucaso.org) :

 

« Les nazis ont acquis le pouvoir par le biais d'élections démocratiques, puis ils ont abusé de la légitimité de leur mandat pour imposer une dictature : vous savez comment cela s'est terminé. Avons-nous encore besoin d'avertir des similitudes avec les communistes contemporains en Croatie ? »

 

L'Eglise, selon cet article, est opposée au programme d'éducation sexuelle dans la mesure où celui-ci fait la promotion de « l'idéologie de l'homosexualité et de l'éroticisme », évacuant la notion de péché et prêchant la contraception. L'archevêque de Zagreb, le cardinal Josip Bozanić, a déclaré qu'une partie du modèle proposé à travers le programme « détruit l'homme », ajoutant que la mise en place de l'éducation sexuelle ne respecte pas le processus démocratique et méconnaît le droit des parents de décider si et comment leurs enfants doivent recevoir cet enseignement à l'école.

 

L'Eglise appelle les parents à boycotter les cours d'éducation sexuelle, le ministre de l'Education a répliqué qu'en ce cas leurs enfants seraient considérés en absence injustifiée.

 

L'article de balcanicaucaso.org continue en s'indignant de l'action de catholiques qui soutiennent « l'excommunication des femmes qui avortent », qui proposent les témoignages de personnes « guéries » de l'homosexualité, ou qui ont obtenu du maire de Zagreb qu'il fasse retirer les affiches d'une pièce de théâtre sur le thème des lesbiennes montrant deux statues de la Vierge s'embrassant : « une image qui paraît-il a grandement incommodé les fidèles ». Ceux-ci sont ensuite comparés avec les musulmans réagissant aux caricatures de Mahomet, et l'auteur se demande si la Croatie ne va pas être le théâtre d'autodafés et de chasses aux sorcières. Le ministre de la Culture croate a défendu ce genre d'affiches en disant qu'elles sont « très nécessaires pour nous enseigner le respect de ceux qui, du point de vue de la majorité, sont différents ».

 

On découvre à la fin de l'article le logo de la communauté européenne assurant que « cette publication a été produite avec l'aide de l'Union européenne » dans le cadre du projet « Tell Europe to Europe » (racontez l'Europe à l'Europe) qui entend porter le message européen dans les médias, sur le net, dans les cinémas, les écoles et les lieux publics. « Pour répondre à la crise avec une nouvelle force et une nouvelle idéalité (sic) ». On a beau apprendre que l'article est de la seule responsabilité de Osservatorio Balvani e Caucaso, et ne peut être invoqué comme reflétant l'avis de l'Union européenne, celle-ci ne peut rejeter toute responsabilité par rapport à des propos qu'elle aide à diffuser.





Source : leblogdejeannesmits.blogspot.com, le 15 février 2013.

 


 




 

 


 

 

Rédigé par brunorosar

Publié dans #Eglise catholique

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