Saint-Blaise
Publié le 26 Novembre 2009
Pourquoi Saint-Blaise ?
Raisons pour lesquelles on a choisi Saint-Blaise comme protecteur de la ville de Dubrovnik.
Saint-Blaise, protecteur ragusain, a joué un rôle important dans la vie quotidienne de la ville de Dubrovnik. Sa fête est le 3 février. Il est relié à de nombreuses cérémonies, moeurs et lois. De nombreuses églises ont été construites en son honneur à l'intérieur de la ville. Au cours de fêtes, on proclamait la "franchisia" de St. Blaise - liberté ou franchise de St. Blaise. En effet, ceux qui avaient des dettes pouvaient entrer dans la ville sans aucun problème trois jours avant et trois jours après la fête ainsi que durant la fête, sans être cités au tribunal. Le 23 février 1453, la franchise de St. Blaise a été prolongée à sept jours avant et après la fête.
St. Blaise a vécu au III siècle, il a été évêque à Sébaste en Cappadoce et martyr à l'époque de l'empereur Dioclétien en 287 ou sous Licinius en 316. Il a été proclamé protecteur de la ville après la fondation et l'agrandissement de la ville et n'a donc pas été le motif de la fondation de la ville. Les annalistes mentionnent l'an 971 quand le saint a fait un miracle en sauvant la ville du siège vénitien et quand il a été pris comme protecteur de la ville. Une église en son honneur a été construite en 972 en-dehors des remparts de la ville.
Les premières reliques de St. Blaise ont été apportées dans la ville après son inauguration, à l'époque de l'évêque Vitalis Gucetic (1023-1057). Il s'agit des os du crâne et de la jambe.
Les Ragusains ont choisi pour protecteur un saint oriental, St. Blaise. La première église qui a été édifiée dans le Kastel a été celle des Sts Serge et Bacchus, saints orientaux également. Le choix est en effet significatif. La ville qui a été fondée en tant que forteresse byzantine est devenue en s'agrandissant progressivement une civitas. La petite commune, se trouvant au carrefour de l'Orient et de l'Occident, sous la pression continue de nombreux conquérants et des Vénitiens qui voulaient la mettre sous leur tutelle, prend un protecteur originaire d'Orient - de Byzance. Mais, même si elle dépendait politiquement de l'Orient, elle a accepté et respecté sans restriction et sans doute possible Rome avec les évêques qui lui étaient soumis. Le choix du patron fut en fait une solution plus politique que religieuse. Ainsi, ce choix, même si Dubrovnik n'était pas en possession des reliques du saint qui sont venues plus tard à Byzance (spécialement le reliquaire du crâne), a été en quelque sorte conditionné par le besoin de se mettre sous la protection de Byzance devant la menace constante de Venise. La légende qui nous parle des débuts du culte de St. Blaise, est justement liée à la sauvegarde de la ville devant l'occupation vénitienne en 971.
Source : Željko Peković - Dubrovnik - La fondation et le développement de la ville médiévale, Musée des monuments archéologiques croates, Split, 1998, p. 92,94,95. Edition bilingue croate-français traduite par Romana Becafgo.
A la Saint-Blaise
Pendant quatre siècles, le drapeau de l'Etat de Dubrovnik fut hissé trois fois par an sur la place de Luža : le 3 février, jour de la Saint-Blaise, le 5 juillet, en l'honneur de la main du saint vénérée comme relique (on baissait le drapeau trente jours plus tard seulement) ainsi que le 3 mai, pendant trois jours, pour la Festa del Altero (sans doute en souvenir du jour où la colonne de Roland fut érigée). Cette coutume fut conservée jusqu'en 1807, année où l'occupant napoléonien interdit de hisser le drapeau de l'Etat de Dubrovnik derrière la colonne de Roland sur la place de Luža. En 1825, la colonne de Roland tomba, victime d'une tempête. La statue de pierre fut transportée dans le Palais du Recteur où elle fut conservée jusqu'à nouvel ordre. En 1878 le monument fut à nouveau érigé, le visage tourné, cette fois, vers le nord.
A partir de 1894, à la Saint-Blaise, il fut à nouveau permis de hisser, sur la place de Luža, la bannière du saint pendant une semaine. La coutume remonte à une décision du Grand Conseil datant du 25 juin de l'an 1347, date à laquelle la main du saint fut gardée comme relique dans l'église Saint-Blaise. Il est permis de penser que la bannière fût hissée chaque année sur la place de Luža bien avant l'installation de la colonne de Roland en son centre. Le drapeau de la République de Dubrovnik, créé plus tard, avait un fond blanc sur lequel se détachait la silhouette de Saint-Blaise, avec de chaque côté les lettres S et B (Sanctus Blasius). Une fois le drapeau hissé, ledit privilège du drapeau entrait en vigueur pour trois jours et plus tard sept jours, période pendant laquelle les débiteurs et les hors-la-loi étaient affranchis de leur peine.
Au XVIIIe siècle, il était coutume d'installer à côté de l'étendard de l'Etat un autre drapeau qui portait l'inscription LIBERTAS (le mot étant réparti sur trois lignes). Ce dernier pouvait être hissé sur les bateaux de la flotte de Dubrovnik, et à côté du drapeau principal, la bannière de saint Blaise. Sur toutes les mers du monde, la marine de Dubrovnik, considéraient le drapeau LIBERTAS comme le symbole de la plus haute valeur de la République, à savoir la liberté. En 1950, à l'ouverture du IIe Festival d'été de Dubrovnik, on hissa sur un mât, derrière la colonne de Roland, le drapeau LIBERTAS qui devint alors le symbole du festival, qui est la manifestation culturelle la plus ancienne et la plus renommée de Croatie.
Aujourd'hui plus personne ne se souvient de qui vient cette merveilleuse idée, qui, un demi-siècle après la reprise de la cérémonie, semble si évidente. Et chaque année, le 10 juillet, à 21 heures, au son de l'Hymne à la liberté de Jakov Gotovac et sur les vers du poète baroque de Dubrovnik, Ivan Gundulić (XVIIe siècle), le drapeau du Festival est hissé sur la colonne de Roland, et pendant six semaines, Dubrovnik devient la Cité des Arts.
Sous le regard vigilant du Roland, le recteur remet la clé de la ville aux artistes et leur ouvre les places, les églises, les cours intérieures, les fortifications pour qu'ils puissent y présenter leurs oeuvres artistiques. Les vers solennels du poète pétrarquiste Hanibal Lucić (XVe, XVIe siècles) sont récités, chantant les louanges, l'art et la littérature de la ville : Dubrovnik, honneur de notre langue, demeure toujours florissante et prospère jusqu'à la fin des temps. Sous l'envol de douzaines de colombes, et au son des trombones et du carillon des clochers de toutes les églises de la ville, le festival imaginaire est inauguré, et les manifestations commencent. La tradition du Festival d'été de Dubrovnik continue et s'étend sur une période de 45 jours. Les sites naturels monumentaux sont transformés en scène à ciel ouvert, et offrent des représentations théâtrales, des concerts, des opéras, des spectacles de danse classique et de danses folkloriques. Dans le cadre harmonieux des édifices de la Renaissance de la ville de Dubrovnik on joue les pièces de Shakespeare, Držić, Goethe, Lucić, Gundulić, Vojnović, Krleža, Goldoni et bien d'autres encore. Nombre d'orchestres symphoniques et d'orchestres de chambre de renom ont interprété les oeuvres de Mozart, Haydn, Sorkočević, Jarnović.
Par Branka Franičević
Source : Orlandovski europski putovi - ouvrage collectif - Adriana Kremenjas-Daničić, 2006, pp. 439-440.